Souvenez-vous, la semaine dernière notre blogueur Jérémie Melki nous avait parlé des Samples. Aujourd’hui, il nous explique en détails le sample et les lois brésiliennes.
L’artiste qui utilise un sample doit « en théorie » le déclarer officiellement, c’est-à-dire demander l’autorisation de son exploitation au propriétaire du morceau (qui souvent exige une compensation financière), sans quoi il se voit poursuivi en justice (si le sample a été clairement identifié).
En règle générale, dans chaque pays, on trouve 2 types de lois protégeant une création musicale : les lois concernant le morceau original (c’est-à-dire le premier enregistrement, en anglais « master recording copyrights ») et les droits d’interprétation (c’est-à-dire rejouer un morceau, en anglais « master publishing copyrights »).
Un rappel sur l’histoire du sample aux États-Unis
Alors que les samples n’étaient en majeure partie pas déclarés aux États-Unis dans les années 80, les artistes samplés, constatant l’augmentation des bénéfices des maisons de production hip-hop, ont commencé à poursuivre en justice ces derniers.
Le premier grand procès date de 1991, où le rappeur américain Biz Markie a utilisé sans autorisation un sample du morceau « alone again » de Gilbert O’Sullivan.
Cette première vague de procès va ainsi modifier les techniques de création musicale, en voici quelques exemples :
- Modifier le sample jusqu’à ne plus le reconnaître, voire même noyer le sample dans des dizaines de samples, afin de ne pas être remarqué par l’artiste samplé et donc éviter les « master recording copyrights ».
- Rejouer le sample avec des musiciens afin de ne payer que les droits d’interprétation (Dr Dre a été le premier à le comprendre, pour la production de son premier album).
- Rejouer le sample et modifier quelques notes pour ne rien payer à l’artiste original (le rappeur français Passi a utilisé la musique de la série « Les Feux de l’amour » en y modifiant quelques notes, pour son morceau « je zappe et je mate »).
Cela n’a pas empêché par la suite quelques affaires de plagiat, notamment le morceau « addictive » de la chanteuse Truth Hurts, produit par DJ Quik qui a samplé le morceau indien « Thoda Resham Lagta Hai » (écouter à 3:06 minutes) de Lata Mangeshkar sans autorisation, ce qui a contraint Dr Dre le fondateur de la maison de production AfterMath Entertainment à payer une forte somme à la compagnie Saregama India.
La loi sur les samples au Brésil
Au Brésil, la « Lei dos Direitos Autorais » (loi sur les droits d’auteurs) paraît plus souple : l’article 24 précise qu’un artiste peut utiliser des petites parties (« pequenos trechos » en portugais) provenant d’un autre morceau, à condition que ces parties ne soient pas modifiées. Si elles le sont, alors l’artiste doit demander l’autorisation au détenteur des droits.
Ceci expliquerait pourquoi les rappeurs brésiliens ne modifient pas systématiquement les samples, comme leurs homologues américains, tel que nous l’avons constaté précédemment à plusieurs reprises.
Mais une loi est toujours discutable, car les « pequenos trechos », petites parties non modifiées, n’incluent pas les samples, qui seraient considérés comme de petites parties modifiées d’un morceau existant (bien que nous ayons constaté dans quelques exemples précédents que certains samples ne sont pas toujours modifiés, et par conséquent seraient donc des « pequenos trechos » …).
Le comportement des rappeurs vis-à-vis de l’utilisation des samples
Comme partout ailleurs, il existe 2 types d’artistes au Brésil : ceux qui demandent l’autorisation au propriétaire du sample… et ceux qui ne demandent pas.
Marcelo D2, pour son dernier album, a demandé l’autorisation aux différents détenteurs de samples… et s’est retrouvé bien souvent dans 2 situations récurrentes dans le monde du sample : un refus, ou un accord moyennant une contribution exorbitante. Par exemple, Bob Dylan lui a refusé d’utiliser la chanson « Mr. Tambourine Man», et le groupe de funk américain The Parliaments lui a demandé 50000 Reais pour l’utilisation d’un seul sample…
Si l’on fait la somme des contributions exorbitantes demandées pour chaque sample autorisé, on doit rapidement envisager d’autres solutions, telles que l’abandon de ces samples, ou l’autorisation d’autres samples, abordables financièrement parlant… ou l’utilisation sans autorisation.
Ça a été le choix du groupe Carioca Cone Crew Diretoria avec la chanson « I put a spell on you » de Nina Simone utilisée et reconnue à la première écoute dans le titre « Chama os mulekes ». Mais ce choix peut s’avérer une perte importante (voire totale) des recettes si la pratique est découverte… ce même groupe a utilisé un sample accéléré du morceau « Falador passa mal » du groupe Os Originais do Samba dans son titre « Falo nada ». Jorge Ben Jor, auteur de cette chanson, a conclu un accord avec le groupe, moyennant le reversement de 30% des recettes…
Par Jérémie Melki pour My Little Brasil