
Digital Factory Brazil reçoit Andiara Petterle, surnommée « l’héroïne d’internet au Brésil », experte du marché digital aujourd’hui à la tête de e.Bricks Digital, filiale du groupe RBS qui nous raconte son histoire. Passionnée par la technologie et les femmes, elle a brillamment réussi à allier les deux dans ses projets.
Expliquez-nous brièvement votre parcours ?
J’ai commencé ma carrière comme universitaire. Après un master en Média et Communication à la PUC de Rio, je me suis ensuite envolée pour le Canada afin de me spécialiser en développement des Médias Intéractifs Numériques à la British Columbia University. Puis j’ai travaillé comme jeune chercheur à l’Université Brown aux Etats-Unis et j’ai étudié à Harvard pour participer au « Women’s Leadership Program » pendant un an. Ce programme m’a fait prendre conscience des enjeux à relever pour les femmes dans le monde du travail.
J’ai toujours eu envie d’entreprendre. Mais, quand j’ai commencé, je n’avais aucune formation en entrepreneuriat. J’ai donc tout appris sur le tas. Après plusieurs expériences malheureuses, sept au total, je me suis lancée en 2005 dans l’aventure Bolsa de Mulher, le plus grand site internet pour les femmes au Brésil, que j’ai co-créé et dirigé pendant 5 ans.
Aujourd’hui, je suis Directrice Stratégie chez eBricks Digital, bras armé du groupe de média RBS, dont la mission est de soutenir le développement des startups digitales au Brésil.
À quel moment avez-vous découvert votre passion pour la technologie et l’entrepreneuriat ?
Le jour de mes 15 ans ! Je pense que je n’étais pas une adolescente comme les autres. Au lieu de demander à mes parents une fête d’anniversaire ou un voyage, j’ai demandé : un ordinateur, une imprimante couleur et un scanner.
Grâce à ces cadeaux, j’ai pu lancer mon premier journal, en format tabloïd. Passionnée, je me suis lancée corps et âme dans la production de ce journal qui m’a permis de me former rapidement.
A 18 ans, je continuais sur ma lancée et réalisais des prestations de services pour des agences de publicité. J’utilisais mon salaire, non pas pour les sorties ou pour m’acheter des vêtements, mais pour investir dans des appareils technologiques de plus en plus pointus ! J’avais déjà des idéees en tête…
À votre avis, qu’est ce qui explique le succès de Bolsa de Mulher ?
Le timing
Avant Bolsa de Mulher, j’ai monté sept projets, qui ont duré moins d’un an. Le fait est que je ne les avais pas lancés au bon moment. A contrario, Bolsa de mulher est arrivé sur le marché brésilien au bon moment, juste après l’explosion de la bulle internet qui nous a “libérés” et “préservés” des concurrents pendant 5 ans. D’ailleurs, même avant, sur cette niche des femmes il y en avait peu. Aujourd’hui, j’ai compris l’importance du timing dans la création d’une entreprise et le lancement d’un projet.
Les relais
Nous avons aussi profité du formidable essor de l’internet et des réseaux sociaux au Brésil, notamment de Facebook, qui a permis à l’entreprise de croître très vite. De 2006 à 2009, nous avons augmenté nos recettes de 7%, uniquement avec notre site internet. Aujourd’hui, la base de contacts de ce site dépasse les 14 millions de femmes.
La vision
Bolsa de Mulher est très vite devenue une holding grâce à la création et à l’acquisition de 22 entreprises, toutes spécialisées dans l’offre de solutions aux femmes entrepreneures, notamment dans le monde du digital.
Pouvez-vous nous décrire l’écosystème entrepreneurial digital au Brésil et quel rôle joue e.Bricks Digital au sein de cet écosystème ?
L’écosystème entrepreneur au Brésil est complexe non seulement à cause de l’absence de formation entrepreneuriale, mais aussi en raison de l’aversion au risque, un trait caractéristique de la culture brésilienne.
Aujourd’hui, j’ai l’impression que les jeunes se lance dans l’entrepreneuriat, moins par conviction ou véritable inspiration, et plus pour fuir un marché du travail jugé peu dynamique et très hiérarchisé. Ils veulent plus de liberté, plus d’autonomie… Et ils pensent (en se trompant) que la carrière d’entrepreneur leur offrira cette liberté et autonomie. Souvent immatures, totalement dépourvus d’expérience, nos jeunes entrepreneurs manquent de capacité de décision et d’exécution. C’est sûrement ce qui explique pourquoi la plupart des startups créées meurent très vite.
C’est de ce constat qu’est née l’idée de e.Bricks, filiale totalement indépendante du Groupe RBS [l’un des leaders brésiliens sur le marché des médias] créée en 2012 pour soutenir le développement des startups digitales au Brésil.
Sa mission est d’accompagner des jeunes sociétés brésiliennes prometteuses à passer du early stage au growth stage. e.Bricks investit ainsi dans des entreprises dirigées par des entrepreneurs d’excellence, qui se positionnent sur des marchés technologiques à forte croissance et disposent déjà d’un prototype fonctionnel (MVP)
Nous contribuons à l’essor de ces entreprises, en fournissant des conseils stratégiques, un support en gestion et en apportant du capital.
Quels sont les points essentiels dont une femme a besoin pour atteindre un poste à haute responsabilité dans une entreprise ?
Avant toutes chose, j’aimerais souligner le fait qu’au Brésil moins de 23% des entrepreneurs sont des femmes. Il y a une véritable absence de soutien envers les femmes dans ce domaine et un manque de modèles à suivre.
Il fut un temps où il fallait se comporter et parler comme un homme pour atteindre des postes à responsabilité. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas ! Il faut exercer son pouvoir sans mettre de côté sa féminité.
Pour moi 5 points sont essentiels :
- Le talent : le seul moyen d’être vraiment talentueuse selon moi est de faire ce qui nous passionne réellement !
- L’inspiration : il faut toujours rester concentrée sur ce que l’on peut améliorer dans notre travail.
- La transpiration : il faut travailler dur…très dur !
- La formation : il ne faut jamais arrêter d’apprendre et d’étudier, pour être en avance sur les tendances de la société.
- Etre heureuse : pour être performant, il faut aussi s’occuper de soi et se sentir bien dans sa vie.
Bref vous l’aurez compris travaillez, travaillez, travaillez et soyez femme !
Par Alexandrine Brami pour Digital Factory Brazil
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